Gourmandise solidaire
C'est lors d'une fête de famille que Marie Brossard a commencé à s'intéresser à la pâtisserie sans gluten. Son jeune frère Pierrot, qui venait tout juste de découvrir son allergie sévère, avait alors pris en charge de faire le dessert pour lui-même et sa famille de gourmand.e.s. « Malheureusement, le gâteau en question n’était pas du tout à la hauteur. Il était friable et insipide. C’est tellement important pour nous la nourriture que j’ai presque grondé mon frère à table, se souvient-elle en riant. Je me suis alors proposée pour acheter le prochain, pensant pouvoir trouver mieux, mais au fil du temps, je me suis vite rendu à l'évidence: toute l’offre sur le marché était décevante. Il fallait donc prendre les choses en main…»


Des débuts plein de découvertes
Tout en travaillant à temps plein en immobilier, Marie se lance alors dans l’élaboration de mélanges de farines sans gluten de première qualité, qui pourraient garantir à tou.te.s, coeliaque ou non, une expérience savoureuse et sans compromis sur le goût ou la texture. Ainsi naissait Lulubelle.
« Pendant plusieurs années, je réalisais les desserts au restaurant L’Incontro, duquel j’étais copropriétaire. Ça a toujours été hyper important pour moi de rassembler tout le monde autour de la table, sans discriminer. L’idée, c’est que les coeliaques soient en sécurité et que les autres (comme moi qui mange du blé) se régalent ». Après des mois de recherche et développement, Marie a finalement trouvé la combinaison gagnante en misant sur un mélange de farines de tapioca, millet, sorgho, avoine sans gluten et d’amidon de pomme de terre. En résultent des confections moelleuses et délicates qui méritent les éloges des plus sévères critiques.
Une vague de fond, d’un océan à l’autre
Au lancement de Lulubelle, en février 2020, aucune épicerie n’ouvrait ses rayons à de nouveaux produits. « Ça été très difficile au début, en plein tempête COVID, mais j’ai persévéré et me suis progressivement installée chez Métro, puis Walmart. Mon passage à l'émission Dans l’oeil du Dragon en 2021 m’a donné beaucoup de crédibilité. Maintenant, Lulubelle est distribué dans plus de 1000 magasins à travers le pays. On est aussi dans les plus grands hôtels au Canada comme le Fairmount, Germain Hôtels et le Grand Pacific Victoria Hotel, pour ne nommer que ceux-là ».
Selon Marie, l’expansion vigoureuse de Lulubelle révèle l’existence d’un besoin réel et la cristallisation de nouvelles habitudes alimentaires dans la population. « Il y a à peine quelques années, plusieurs pensaient que les produits sans gluten, c’était une mode un peu superficielle, alors qu’on se rend compte que c’est en fait une vague de fond. Pas étonnant, puisque depuis les années 50, les développements agro-industriels et les ingénieurs alimentaires qui standardisent la production sur le marché ont effectivement fait exploser la concentration en gluten dans les farines commerciales. Notre système digestif n’a pas pu évoluer et s'adapter en si peu de temps pour métaboliser cette hausse significative. Voilà pourquoi de plus en plus de gens découvrent aujourd’hui qu’ils sont intolérants et choisissent d’apporter des changements à leur alimentation. D’autres, comme certains athlètes de haut niveau, choisissent de consommer des aliments moins inflammatoires, pour se sentir plus légers et augmenter leur bien-être général ».
Nourrir l’avenir
Pour ceux et celles à qui cela importe, il semble effectivement y avoir de quoi se sentir bien quand on encourage une entreprise féminine d’ici, certifié B Corp (les B Corps sont des entreprises qui agissent de manière à servir l'intérêt public au lieu de s'employer exclusivement à réaliser des profits), qui s’évertue de faire des choix éthiques et responsables dans toutes ses opérations:
« À cause de nos préoccupations environnementales, on essaie de travailler localement dès que c'est possible. Nos emballages sont entièrement faits ici. Malgré notre climat, disons capricieux, on s’approvisionne en farines d'avoine et en amidon de pommes de terre québécois. Et quand on doit sourcer un ingrédient à l’étranger, comme notre farine de manioc, par exemple, on s’assure de le faire dans les meilleures conditions possibles pour la nature et les travailleur.euse.s ».
En effet, Lulubelle obtient sa farine de manioc à travers l’OBNL Vergers d’Afrique, qui valorise les terres arides du Burkina Faso par la plantation d’arbres fruitiers et la réalisation de jardins communautaires, tout en encourageant l’autonomisation économique des femmes à travers la transformation et la commercialisation des produits de la terre. Marie poursuit, tout sourire: « Je suis très fière de collaborer avec cette initiative qui améliore concrètement la vie de tellement de femmes fragilisées par les changements climatiques. La différence est flagrante dans leur milieu de vie: grâce à l’irrigation (permise en partie par la revalorisation de la tubulure d’acériculture québécoise!), il y a beaucoup de végétations au village. L’OBNL a construit un puits et électrifié les maisons. Ce qui veut dire que les jeunes obtiennent de la lumière pour étudier après la tombée du jour et poursuivre leur éducation, littéralement bâtir leur avenir ».
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Marie poursuit, pleine d’élan: « D’un point de vue humanitaire, c’est extrêmement payant de donner du pouvoir économique aux femmes. On ne peut pas s’imaginer consommer quelque chose sans le partager. Il paraitrait qu’une femme qui travaille et gagne un salaire nourrit en moyenne 10 personnes. Je le sais par intuition, mais des études le prouvent aussi, l’économie des femmes est simplement plus vaste, plus généreuse ».
« Ici, on aide le Club des petits déjeuners, car il faut agir localement d’abord. Quand on nourrit la jeunesse, on assure l’avenir du pays. Je pense avec tendresse à mes neveux et nièces qui habitent à Vancouver et à qui je veux laisser un futur lumineux, confortable. Ils me manquent souvent. C'est pour ça que je tiens à rassembler tout le monde quand je peux, idéalement autour de quelques douceurs sucrées! À l’approche du temps des Fêtes, alors qu’on planifie des brunchs paresseux et des matins doux en famille, la bouffe n’est qu’un prétexte pour être ensemble. J’ai hâte d’être en pyjama et de sortir mon mélange à gaufres! » Même si Marie s’avoue évidemment biaisée, elle conclut en affirmant avec une certitude apparemment inébranlable que les gaufres Lulubelle sont d’ailleurs les meilleures qu’elle n’a jamais mangées! À constater la bienveillance et l’intégrité avec laquelle elle mène son entreprise, on est définitivement tenté.e de la croire et d’enfiler son tablier pour en avoir le cœur net!