Changer pour mieux se connaître
La Brûlerie Emma, c’est d’abord une histoire d’amitié entre deux jeunes femmes qui partagent une passion pour le bon café et l’engagement communautaire. « On a toujours été amies, et le café a toujours fait partie de notre amitié », affirme Emilie, cofondatrice de la brûlerie, située dans le quartier Robert Cauchon à Salaberry-de-Valleyfield. Tout comme sa complice Marie-Ève, qui travaillait en communication depuis près de 10 ans, la jeune femme était déjà bien engagée dans son sillon professionnel (l’enseignement au primaire, auprès d’élèves en situation de précarité) quand elle a décidé de bifurquer vers l’entrepreneuriat. « Je découvre des parties de moi que je ne connaissais pas avant, je relève des défis que je ne savais pas avoir la force de rencontrer. Tout ce qui touche le relationnel et les interactions humaines, c’est mon fort, mais je ne savais pas que j’étais capable de faire du démarchage d'affaires ou de la gestion d’inventaire rigoureuse! C’est une aventure stimulante que de se connaître mieux en exerçant un métier passionnant pour lequel il n’existe pas vraiment d’école à proprement parler ».


Des valeurs fortes
Les filles ont fait leurs classes avec Maxime Verrette, de la COOP Torréfaction Québec, située à Blainville, où elles ont pu apprendre les rudiments de la torréfaction et perfectionner les aptitudes requises pour produire du bon café. « C’est vraiment notre mentor, on lui doit beaucoup », ajoute la jeune femme tout sourire. Fortes des apprentissages acquis à la COOP, les filles ont élaboré leurs recettes en édifiant les valeurs centrales de leur entreprise, soit la qualité, l’accessibilité et le respect de l’environnement et des communautés.
La Brûlerie Emma produit des cafés équilibrés d’abord, qui évitent les profils trop fruités et acidulés, courants dans les mélanges dits de la troisième vague, et les torréfactions italiennes très foncées et souvent plus âcres. Émilie explique: « Quand tu commences ta journée le matin, tu veux quelque chose d’équilibré et de réconfortant, qui t'accompagne dans ta routine avec bienveillance. On pense à notre clientèle, qu’on accompagne réellement dans un changement d’habitudes. Avant notre venue dans le coin, il n’y avait pas vraiment d’options intéressantes, qualitatives, disons. Quand je vends du café, je prends la peine, avec toute la transparence du monde, d’expliquer aux gens toutes nos démarches, de la plante à la tasse. Je leur suggère de se refaire le palais, de réapprivoiser le vrai bon café. Je les défie de toujours l’essayer noir d’abord, pour comprendre ce que certains d’entre eux souhaitaient masquer avec du lait ou du sucre… c’est un peu pédagogique en fait, ajoute-t-elle en riant. Quand on fait des adeptes, ils ne reviennent plus en arrière ».
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Transparence et coopétition
Cette démarche intègre et transparente trouve des échos dans la rigueur des méthodes commerciales chez Brûlerie Emma: Émilie et Marie-Ève s’approvisionnent en grains de café via le commerce direct dès que c’est possible, ou alors font affaire avec un importateur de père en fils depuis trois générations qui porte, comme elles, les valeurs de justice et d’équité en très haute estime. « De la terre à notre tasse, il faut que tous nos choix soient les plus écologiques, équitables et logiques possibles. Quitte à gruger nos marges de profits, on fait les concessions qu’il faut pour y arriver et vivre selon nos valeurs », affirme Emilie.
Elle ajoute en rafale: « On utilise des sacs faits au Canada qui sont omnidégradables, on fait la promotion de produits dérivés d’entreprises d’ici avec lesquelles on adore collaborer, comme cette chocolatière d’Oka, ou ces producteurs de chandelles de Montréal. Tout ça est comme une boucle, un cycle: on veut que notre entreprise soit rassembleuse pour la communauté, mais aussi pour les autres commerces. Qu’on s’élève ensemble dans la coopétition. C’est impossible pour nous de penser autrement ».


Un grain à la fois
En plus de ces considérations opérationnelles, Brûlerie Emma verse annuellement 5% de ses profits aux OBNL de la région. « Entre autres, nous aidons directement les intervenant.e.s qui financent souvent les achats de denrées destinées aux plus vulnérables du quartier. J’ai connu cette réalité dans l’enseignement: le travail sur le terrain m'amenait à identifier tellement de besoins urgents et immédiats, que je les comblais souvent avec ma propre paie. Bref, on leur a ouvert un compte discrétionnaire pour alléger leur fardeau, dans lequel on fait des dépôts annuellement ».
Émilie conclut, inspirante: « Honnêtement, avoir un impact positif sur ma communauté est prioritaire. Le café c’est un peu un prétexte. L’achat local est aussi un vote. Je souhaite que les gens sortent de chez eux, qu’ils investissent leur quartier, tissent des liens, intègrent les nouveaux et nouvelles arrivant.e.s, fassent ensemble des petits pas pour transformer leur quotidien. Je pense que ce que j’essaie de dire c’est: n’achetez pas juste local, vivez local et faites de votre ville, de votre quartier, le plus bel endroit du monde! »